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Vigiles

Les photographies de ces Vigiles ont été prises lors de promenades sans intention dans le quartier berlinois des granges, la banlieue de Rosenthal et l'île des musées à Mitte. Le silence des labyrinthes nocturnes m'a toujours attiré, notamment parce que le cloisonnement extérieur contre le regard intérieur, cette expression banale de l'architecture contemporaine, n'est plus dominante. Les ambiances intérieures et extérieures vécues lors de ces promenades, la sensation étonnante d'être regardé par un décor trouvé, constituent le point de départ de la création des images. En acceptant de lire ces humeurs et ces sentiments comme des signes de lois et d'idées qu'il s'agit de transformer en un équivalent spirituel, au sens de Marcel Proust, j'ai été tentée de visualiser les impressions.

Les travaux documentent, par leur luminosité crépusculaire, le visible d'un monde nocturne et, en même temps, un caché qui est suggéré par le sfumato prédominant des prises de vue. Une ambiance qui relativise le temps permet de jeter sur les scènes capturées un regard oublieux du monde et de soi-même, qui fait surgir de l'obscurité un flou transparent et, avec lui, la question de savoir d'où les choses nous apparaissent dans leur forme. Des réponses valides et exigeantes à cette question glissent, après une brève illumination, dans la mélancolie de leur origine. Les photographies racontent comment trouver et être regardé un moment qui m'appartient. Dans cette Lucubratio également, les fragments, signes et motifs trouvés renvoient, après une interprétation individuelle, à la contingence et au mystère d'un tout vivant.